Voici
Il est 22 heures, dans la nuit avec l’air doux de la ville de Lojas, nous prenons le bus en direction du Pérou. Il existe plusieurs points ou passer la frontière, certains plus recommandés que d’autres. Désirant nous rendre sur la cote à l’ouest, notre ville d’arrivée sera Piura, une ville qui n’est pas réputée pour ses attraits touristiques mais qui ne nous décevra pas pour autant.
Nous prenons un bus économique toujours aussi pourri, rempli de locaux mais avec quelques étrangers également. On peut distinguer presque à l’œil nu des différences physiques sur les gens qui peuplent l’autocar, ceux qui sont du Pérou ou les Équatoriens de passage. J’écoute mes podcasts en regardant défiler les montagnes dans l’obscurité, je sais que nous avons un arrêt à la frontière vers 3h30, cela ne m’incite pas à dormir. Même en squattant deux sièges pour m’en faire un mini-lit, il n’y a rien à faire, c’est toujours aussi inconfortable surtout avec mes grandes jambes.
Presque à l’heure, le bus se gare devant 4-5 algécos alignés pour meubler l’espace entre le poste de controle désespérément vide à cette heure-ci et le pont qui sépare les deux pays. Nous tombons sur deux douaniers plutôt sympathiques qui nous distribuent deux fiches à remplir dans le froid en compagnie de 2 argentins et 3 anglais. Nous obtenons nos tampons de sortie et traversons le pont pour obtenir celui d’entrée. Un garde, visiblement payé pour assurer le trafic et le contrôle des véhicules, préfère ronfler à pleines narines avachi sur son poste. Il en va de même pour celui censé nous tamponner le passeport. Il dort à plein régime, il nous faudra de la patience et de gros coups sur sa fenêtre pour le faire se lever et nous donner le sésame de 90 jours pour cette nouvelle destination. Une fois tout cela en règle, nous remontons dans le bus finir notre nuit.
Nous arrivons assez tôt dans la ville de Piura, notre premier contact avec ce pays. On ne peut pas dire que cela soit la plus propice à véhiculer une bonne image. En descendant du bus, des chauffeurs de taxi insistants nous sautent dessus, ce n’est d’ordinaire pas très agréable mais en se réveillant après une courte nuit encore moins. Comme à mon habitude, je prends la main de ma chérie et nous nous écartons du terminal de bus.
En marchant complètement au pif dans la rue, je vois un monsieur d’un certain age avancer vers moi, il a un air sympathique qui incite à engager la discussion. Je lui demande l’emplacement d’un distributeur de billets mais il ne comprend pas ce que nous faisons dans ce quartier car il est selon lui pas du tout sur. « Je vous accompagne ! ». Nous voila déambulant dans la rue en bonne compagnie, lui avec son journal sous le bras et nous nos gros sacs sur le dos. « Mais au fait vous avez petit-déjeuné ? », une invitation que nous nous empressons d’accepter afin de faire plus ample connaissance. Il s’appelle José, il a la soixantaine passée, marié avec 3 grands enfants émancipés, il est ancien ingénieur agronome, spécialisé dans les fertilisants et donne encore des cours à la fac 2 fois par semaine. « Mais au fait, vous voulez surement prendre une douche après cette nuit de bus ? » C’est proposé avec tellement de gentillesse et d’aplomb que nous acceptons, plus pour approfondir cette rencontre que pour se rafraîchir. Le timing est parfait car nous avons un rendez-vous l’après midi dans la ville de Mancora pour un travail, à 3 heures de là.
Nous arrivons dans un quartier résidentiel assez pauvre. Les rues sont en sable, les toits des maisons ne sont pas (et le seront surement jamais) terminés et les grilles devant les maisons sont cadenassées. Notre taxi « pot de yaourt » nous dépose devant chez lui et nous sommes immédiatement accueillis par sa femme Paula, professeure dans une école du coin. « Bienvenue chez nous, nous sommes pauvres mais nous avons un grand coeur », cela fut sa première phrase, son joli sourire est vraiment accueillant et nous buvons un café en papotant. Nous leur racontons notre voyage, ce que nous avons vu et voulons voir, notre vie en France et nous en apprenons tout autant sur eux, ils nous parlent de leur boulot respectif, de la fierté de leurs enfants et de nous accueillir chez eux. C’est l’anniversaire de Paula et José débouche une bouteille de vin argentin pour fêter cet événement ainsi que notre rencontre. Nous trinquons de bon coeur, le temps passe vite et il nous faut déja les quitter. Piura étant le point de départ de notre prochaine destination dans le sud, nous promettons de revenir les voir à notre retour de Mancora, nous nous accolons et nous saluons avec émotion.
Mancora, la ville côtière où il fait toujours beau
Après deux bonnes heures de route dans un véritable désert digne de ceux que l’on trouve en Arizona, nous débarquons sur cette côte très aride. Nous traversons plusieurs petits villages qui ont l’air assez sympas avant de rejoindre Mancora. C’est assez roots, il y a des moto-taxi en surnombre prêts à vous vendre tout et n’importe quoi, des rabatteurs pour restaurants qui se font la guerre et tout cela concentré sur la panaméricaine qui coupe la ville en deux. Nous prenons un moto-taxi pour rejoindre l’eco-lodge où nous avons rendez-vous, le chauffeur ne le connait pas car il n’est visiblement pas super réputé, vu les prix pratiqués j’ai compris pourquoi par la suite.
Il y a une énorme concurrence dans l’hôtelerie à cet endroit, chacun fait ce qu’il peut pour tirer son épingle du jeu. C’est justement le rôle de ma mission pour Cynthia, la patronne qui attend beaucoup des modifications que nous allons faire pour rebooster un peu son chiffre d’affaire. En plus de la réalisation du site internet à proprement parlé, j’arrive à prodiguer des conseils sur les prix, les arguments de vente et certaines choses qui peuvent séduire les européens. Ce n’est pourtant pas du tout mon domaine à la base mais à force je commence à avoir une certaine expertise en la matière. Naif Mancora Eco Lodge Mancora.
Nous sommes accueillis comme des rois dans le bungalow deluxe. Autant être franc, nous n’avons pas fait grand chose dans cette ville à part des aller-retours entre le bungalow, la plage et le bord de mer où se trouve l’animation. Nous n’avons plus de photos pour illustrer ce bord de mer somme toute banal. La plage est plutôt propre, le sable jaunâtre et les vagues pas à mon gout même si c’est le paradis du surfeur ici. Nous passerons de beaux moments à sillonner ce bord de mer, les petites ruelles en sable de la ville et à profiter de nous tout simplement.
Invitation dans la classe de Paola à Piura
C’est le teint bronzé que nous retrouvons José et Paula, toujours aussi contents de nous retrouver. Ils nous avertissent dès le départ qu’ils ne peuvent pas nous héberger convenablement et allons choisir un hôtel dans un quartier animé du centre ville. Les restaurants servent enfin de la nourriture savoureuse et assaisonnée avec gout, nous découvrirons les plats typiques comme le ceviche ou les pommes de terre a la huancaina. Nous resterons 3 nuits dans la ville, le temps de pouvoir profiter de ce charmant couple. José s’avère être un guide sensationnel, il nous attend tous les matins devant l’hôtel pour nos expéditions journalières. Nous allons visiter un grand marché, gouter les spécialités ou tout simplement jouer aux cartes quand il fait trop chaud. De vrais moments de partage autant pour Marlène que pour moi.
Avant de partir pour Mancora, j’avais indiqué à Paula que nous souhaiterions assister à une classe. C’était un des « défis » que nous nous étions fixé et cela allait visiblement se réaliser. Paula nous informe que sa classe de 35 filles, nous attend un après-midi pour un moment d’échange avec elles. Cela faisait une semaine que toute la classe était prête pour cet « événement ». Nous nous y rendons et attendons patiemment dans le hall en entendant toutes ces filles jouer dans la cour, nous avons un peu le trac.
Paula vient nous chercher en nous disant de la rejoindre par surprise quand la classe aura reprise. On se présente devant la classe entrouverte et on voit les visages de toutes ces filles d’une dizaine d’années qui s’illuminent. Elles se lèvent toutes, applaudissent et nous sommes assis face à la classe. Nous aurons droit à une chanson, un exposé sur le virus Ebola (oui il y a mieux mais c’était d’actualité) et un moment très amusant de questions-réponses.
Questions des filles
Les enfants sont comment en France ?
C’est qui le personnage qui représente le mieux la France ?
Les français se sentent-ils concernés par l’écologie ?
Mais vous ne parlez pas Espagnol la-bas ?
C’est vrai que vous avez une crise de l’eau en France ? (Toute l’Amérique du sud pense ça… jamais compris pourquoi)
Mais pourquoi vous voyagez ?
Un échange très intéressant où nous avons pu transmettre un peu nos coutumes et parler de l’importance de l’école pour l’avenir (c’était le seul souhait de Paula sur notre discours). La classe se trouve sur un étage où il y a 3 classes de filles sensiblement du même age. Nous ferons aussi le tour des autres classes pour « ne pas faire de jalouses ». Nous aurons droit à des centaines de petits mots de remerciement, tout autant de bracelets Rainbow Loom et des demandes d’autographes. Une vraie vie de star à la fin des cours, les filles ne veulent pas nous laisser partir et Paula arrive à nous extraire habilement et nous partons ensemble en moto-taxi. Nous raconterons cette expérience incroyable le soir même à José et leur fille lors d’un dîner d’adieu.
Siempre tanta emoción en sus textos,
esta bien !!!